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La frayeur reprend son ame ;
Elle crie, elle se pasme
Dans les bras du desespoir,
Et le nocher de la Parque
Croit que bien tost dans sa barque
Son ombre se fera voir.

Le triste et désolé père,
Arrachant ses blancs cheveux,
Quoy que nulle ayde il n’espère,
Redouble à ce coup les vœux ;
Et la mère repentante,
D’une main fiere et tremblante
Voulant punir sa beauté,
De son sang signe en sa joue
Comme son cœur desadvoue
Ce qu’a dit sa vanité.

Est-ce là tout le remède,
Dit Persée, approchant d’eux,
Que l’innocente Andromede
Doit attendre de vous deux ?
N’avez-vous point d’autres armes
Que les complaintes, les larmes,
Les vœux et l’estonnement
Et verrez-vous sans obstacle,
D’un si périlleux spectacle
Le tragique evenement ?

Non, non, je suis trop sensible,
Et trop plein d’amour aussi :
À ma valeur invincible
Laissez-en tout le soucy ;
Seulement, en recompense
Des maux où, pour sa défense,
Je m’en vay me hazarder,
Vostre foy me soit donnée