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LA PHYSIQUE DE VOLTAIRE.

château de Cirey, près de Chaumont ; c’était une retraite commode, à deux pas de la frontière de Lorraine, et d’où l’on pouvait fuir à la première alerte. Voltaire courut s’y cacher, et madame du Châtelet se hâta de l’y rejoindre.

Cirey était fort délabré. Il fallut d’abord le rendre habitable. Voilà Voltaire changé en architecte, faisant construire des corps de bâtiments, mettant des cheminées où il y avait des escaliers et des escaliers à la place des cheminées, faisant peindre, lambrisser, vernisser, dorer les murs, présidant à la plantation des jardins, installant les écuries. C’est ainsi qu’il organisa cette résidence de Cirey, où, — sauf quelques excursions à Paris et en Hollande, une visite au prince royal de Prusse et quelques séjours à la cour du roi Stanislas, — il demeura jusqu’en 1749.


Comme les années passées à Cirey sont celles qui marquent le plus dans la carrière scientifique, de Voltaire, comme nous nous proposons d’examiner avec quelques développements les divers travaux qu’il y produisit, on nous pardonnera de donner avant tout et pour n’y plus revenir quelques indications sur les lieux mêmes, sur les hôtes du château, sur la vie qu’on y menait. On aura ainsi le cadre où se place plus particulièrement la figure de Voltaire physicien.

« On vous attend à Cirey, écrit Voltaire à M. de la Faye, secrétaire du cabinet du roi ; venez voir la maison dont j’ai été l’architecte. J’imite Apollon : je garde des troupeaux, je bâtis, je fais des vers, mais je ne suis pas chassé du ciel. Vous verrez sur la porte :

Ingens incepta est, fit parvula casa, sed ævum
Degitur hìc felix et bene, magna sat est. »

On pouvait lire encore, il y a quelques années, cette inscri-