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VOLTAIRE À LONDRES.

parti pris et à ne lui demander que les enseignements qu’elle peut donner. Au moment même où il mettait le pied sur le sol anglais, Voltaire put voir les splendides funérailles que la nation faisait à un homme de génie qui avait su arracher à la nature quelques-uns de ses secrets ; la dépouille mortelle de Newton était portée en terre avec tout l’éclat d’une magnificence royale : on eût dit d’un souverain « qui aurait fait le bonheur de ses peuples. »

Cette nation qui s’administrait elle-même se faisait donc remarquer par les soins qu’elle donnait aux sciences ; elles s’y développaient comme des fruits spontanés du génie national. La Société royale de Londres s’était fondée, comme on sait, avec tous les caractères d’une institution privée. C’est à ce mouvement que rendait hommage quelques années plus tard le rédacteur de la préface de l’Encyclopédie. « Les savants, disait d’Alembert, n’ont pas toujours besoin d’être récompensés pour se multiplier. Témoin l’Angleterre, à qui les sciences doivent tant, sans que le gouvernement fasse rien pour elles. Il est vrai que la nation les considère, qu’elle les respecte même, et cette espèce de récompense, supérieure à toutes les autres, est sans doute le moyen le plus sûr de faire fleurir les sciences et les arts, parce que c’est le gouvernement qui donne les places et le public qui distribue l’estime… L’amour des sciences, qui est un mérite chez nos voisins, n’est encore à la vérité qu’une mode parmi nous, et ne sera peut-être jamais autre chose. »


Les impressions variées que la société anglaise fit sur Voltaire se retrouvent dans les Lettres philosophiques ou Lettres sur les Anglais, qu’il écrivit pendant son séjour à Londres. Publiées en anglais, au moins partiellement, dès l’année 1728, elles ne pa-