Page:Saigey - Les Sciences au XVIIIe siècle.djvu/206

Cette page a été validée par deux contributeurs.
193
LAVOISIER.

sources du Susquehannah (1804), défendant jusqu’au dernier jour la doctrine de Stahl et repoussant les idées de Lavoisier. Quant à Cavendish, l’illustre inventeur de l’hydrogène, il publiait en 1784 une exposition détaillée de la théorie du phlogistique et la défendait par mille ingénieux arguments. Enfin Scheele, le grand chimiste suédois, mourut en 1786, sans avoir cessé de professer la doctrine du phlogistique ; il est vrai qu’il y avait apporté peu à peu divers tempéraments pour la mettre en harmonie avec les idées nouvelles.

Cependant le système de Lavoisier se répandait graduellement, et l’on y faisait rentrer un nombre de plus en plus considérable de corps. Les principes que le maître avait démontrés pour les combinaisons oxygénées s’appliquaient par extension aux corps dépourvus d’oxygène. Un sulfure résulte de la combinaison du soufre avec un métal, un phosphore renferme un métal uni au phosphore. Ces sulfures et ces phosphores, composés binaires, se combinent eux-mêmes deux à deux pour former des corps plus compliqués, des sulfosels ou des phosphosels. Ainsi toutes les combinaisons chimiques, celles qui contiennent de l’oxygène, aussi bien que celles qui en sont dépourvues, ont une constitution binaire : tel est le trait caractéristique du système. Les corps simples ou éléments s’unissent d’abord deux à deux, et les corps composés qui en résultent se combinent eux-mêmes suivant la même règle. C’est un dualisme universel.

Un langage chimique admirablement imaginé vint bientôt se mettre au service de cette théorie.

Il y avait alors à Dijon un avocat général, Guyton de Morveau, qui consacrait à l’étude de la chimie les loisirs que lui laissait sa profession de magistrat ; il avait fait établir des