Page:Saigey - Les Sciences au XVIIIe siècle.djvu/173

Cette page a été validée par deux contributeurs.
160
L’ACADÉMIE ET LES ACADÉMICIENS.

au pôle qu’à l’équateur, et ils en tiraient, ainsi que nous l’avons déjà expliqué, cette conclusion géométrique que la terre est un sphéroïde allongé dans le sens des pôles. C’est en 1735 que l’Académie résolut de vérifier solennellement s’il fallait admettre un résultat si contraire au système newtonien. Comme on le sait, elle fit partir une double mission : Maupertuis fit route pour la Laponie, emmenant avec lui Clairaut, Lemonnier et l’abbé Outhier ; La Condamine, Bouguer et Godin, accompagnés de Joseph de Jussieu et de Couplet, s’embarquèrent pour le Pérou. Nous avons dit comment l’expédition du Nord fut heureuse et comment Maupertuis revint triomphant en 1738, rapportant les mesures polaires. On se rappelle le succès qu’il obtint et la popularité que lui donnèrent les gravures du temps, qui le représentaient en costume d’Hercule lapon, un bonnet fourré sur les yeux, tenant d’une main une massue et de l’autre écrasant un globe terrestre. Si la mission de Laponie réussit pleinement, celle de l’équateur subit au contraire une série de traverses funestes. Couplet en arrivant à Quito fut emporté par une fièvre maligne. Seniergues, le chirurgien de l’expédition, fut assassiné par la populace de Cuença. Godin fut pris d’autorité par le vice-roi du Pérou et installé à Lima dans une chaire de mathématiques qu’il n’eut pas la faculté de refuser. Joseph de Jussieu quitta lui-même l’expédition et se fixa au Pérou, d’où il ne revint que plus de trente ans après, infirme et entièrement privé de mémoire. Bouguer et La Condamine rapportèrent seuls en France les résultats de la mission retardée par mille contre-temps ; Bouguer ne revint qu’en 1742, La Condamine en 1743, et, à peine réunis à Paris, ils donnèrent au public le fâcheux spectacle de leurs dissentiments et de leur rivalité.

Citons encore le voyage que La Caille fit en 1752 au cap de