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LA PHYSIQUE DE VOLTAIRE.

rait aborder de front, et qui donnerait lieu à un tableau des plus intéressants ; mais on ne se propose pas, dans les pages qui suivent, un travail si complet : on veut seulement éclairer la question dans une certaine mesure par un exemple particulier. À toute époque, il y a un petit nombre d’hommes, une élite, qui possèdent, au moins dans leurs données essentielles, les connaissances acquises avant eux. Parmi les grands esprits du XVIIIe siècle, nous prendrons le plus ouvert à toutes les idées, le plus apte à les embrasser et à les rendre toutes, le plus encyclopédique en un mot, nous prendrons Voltaire ; nous nous demanderons ce qu’il a su et pensé sur les principaux problèmes qui composent le domaine des sciences proprement dites.

L’esquisse que nous ferons ainsi nous donnera un aperçu de l’état des choses ; mais elle sera nécessairement incomplète et tout empreinte de la personnalité de notre auteur. Voltaire en effet est avant tout un homme de combat ; sa vie est une lutte de soixante ans, lutte incessante pour le triomphe de la raison. Il a cherché des armes de toutes parts ; il a discipliné, pour les mener à la guerre, tous les genres de littérature, la prose et les vers, la tragédie et la comédie, la philosophie et le roman, l’histoire et l’épopée. Les sciences lui ont aussi fourni leurs bataillons ; elles prennent donc entre ses mains l’allure militante, elles courent sus à l’ennemi, elles s’occupent de détruire au moins autant que d’édifier. On sait ce que Voltaire répondait à ceux qui lui reprochaient de ne faire que des ruines. « Eh quoi ! disait-il, je vous délivre des monstres qui vous dévoraient et vous me demandez ce que je veux mettre à leur place ! » C’est ainsi qu’en fait de sciences il s’attaque souvent aux systèmes sans prétendre à les remplacer.

Quant à la physionomie même de Voltaire, il y a sans doute