Chapitre V.
vis, qu’auec la grace du bon Dieu, nous
sommes arriuez iusques-là, que d’auoisiner
le pays de nos Hurons, il est maintenant
temps que ie commence à en traicter plus
amplement, et de la façon de faire de ses habitans,
non à la maniere de certaines personnes, lesquelles
descriuans leurs Histoires, ne disent ordinairement
que les choses principales, et les enrichissent encore
tellement, quand on en vient à l’experience, on n’y
voit plus la face de l’Autheur : car i’escris non-seulement
les choses principales, comme elles sont, mais
aussi les moindres et plus petites, auec la mesme
naïfueté et simplicité que i’ay accoustumé.
81|| C’est pourquoy ie prie le Lecteur d’auoir pour agreable ma maniere de proceder, et d’excuser si pour mieux faire comprendre l’humeur de nos Sauuages, i’ay esté contrainct inserer icy plusieurs choses inciuiles et extrauagantes, d’autant que l’on ne peut pas donner vne entiere cognoissance d’vn pays estranger, ny ce qui est de son gouuernement, qu’en faisant voir auec le bien, le mal et l’imperfection qui s’y retrouue : autrement il ne m’eust fallu descrire les mœurs des Sauuages, s’il ne s’y trouuoit rien de sauuage, mais des mœurs polies et ciuiles, comme les peuples qui sont cultiués par la religion et pieté, ou par des Magistrats et Sages, qui par leurs bonnes