Page:Sagard - Le Grand voyage du pays des Hurons (Avec un dictionnaire de la langue huronne), Librairie Tross, 1865.djvu/92

Cette page a été validée par deux contributeurs.
— 54 —

et Eronon, signifie Nation. Ils sont esloignez d’eux d’enuiron deux cens lieues et plus ; ils vont par troupes en plusieurs regions et contrées, esloignées de plus de quatre cens lieues (à ce qu’ils m’ont dit) où ils trafiquent de leurs marchandises, et eschangent pour des pelleteries, peintures, pourceleines, et autres fatras.

Les femmes viuent fort bien auec leurs marys, et ont cette coustume auec toutes les autres femmes des peuples errans, que 79|| lors qu’elles ont leurs mois ; elles se retirent d’auec leurs marys, et la fille d’auec ses pere et mere, et autres parents, et s’en vont en de certaines Cabanes escartées et esloignées de leur village, où elles sejournent et demeurent tout le temps de ces incommoditez, sans auoir aucune compagnie d’hommes, lesquels leur portent des viures et ce qui leur est necessaire, iusqu’à leur retour, si elles-mesmes n’emportent suffisamment pour leur prouision, comme elles font ordinairement. Entre les Hurons, et autres peuples sedentaires, les femmes ny les filles ne sortent point de leur maison ou village, pour semblables incommoditez : mais elles font leur manger en de petits pots à part pendant ce temps-là, et ne permettent à personne de manger de leurs viandes et menestres : de sorte qu’elles semblent imiter les Iuisues, lesquelles s’estimoient immondes pendant le temps de leurs fleurs. Ie n’ay peu apprendre d’où leur estoit arriué cette coustume de se separer ainsi, quoy que ie l’estime pleine d’honnesteté.