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Les Canadiens, Montagnais, Algoumequins et autres peuples errans, font quelqu’autre particuliere ceremonie enuers les corps des deffuncts : car ils n’ont desia point de Cimetiere commun et ar-288||resté ; ains enseuelissent et enterrent ordinairemen les corps de leurs parens deffuncts parmy les bois, proche de quelque gros arbre, ou autre marque, pour en recognoistre le lieu, et auec ces corps enterrent aussi leurs meubles, peaux, chaudieres, escuelles, cueilliers et autres choses du deffunct, auec son arc et ses flesches, si c’est vn homme, puis mettent des escorces et des grosses busches par-dessus, et de la terre après, pour en oster la cognoissance aux Estrangers. Et faut noter qu’on ne sçauroit en rien tant les offencer, qu’à fouiller et desrober dans les sepulchres de leurs parens, et que si on y estoit trouué, on n’en pourroit pas moins attendre qu’vne mort tres-cruelle et rigoureuse, et pour tesmoigner encore l’affection et reuerence qu’ils ont aux os de leurs parens : si le feu se prenoit en leur village et en leur cimetière, ils courroient premierement esteindre celuy du cimetière, et puis celuy du village.

Entre quelque Nation de nos Sauuages, ils ont accoustumé de se peindre le visage de noir à la mort de leurs parens et amis, qui est vn signe de deuil : ils peindent aussi le visage du deffunct, et l’enjo-289||liuent de matachias, plumes et autres bagatelles, et s’il est mort en guerre, le Capitaine faict vne Harangue en manière d’Oraison funèbre, en la presence du corps, incitant et exhortant l’assemblée, sur la mort du deffunct, de prendre vengeance d’vne telle meschanceté, et de faire la guerre à ses ennemis, le plus prompte-