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suiet il le feroit, puis que pour l’ordinaire cela ne se practique point que pour ceux qui sont entachez de maladie sale ou dangereuse, lesquels on contrainct seuls, et non les autres, de se separer du commun iusques à entiere guerison, qui est vne coustume et ordonnance louable et tres-bonne, et qui mesme deuroit estre obseruée en tout pays.

À ce propos et pour confirmation, ie diray, que comme ie me promenois vn iour seul, dans les bois de la petite Nation des Quieunontateronons, i’apperceu vn peu de fumée, et désireux de voir que c’estoit, i’aduançay, et tiray celle part, où 274|| ie trouuay vne Cabane ronde, faicte en façon d’vne Tourelle ou Pyramide haute esleuée, ayant au faiste vn trou ou souspiral par où sortoit la fumée : non content, i’ouuris doucement la petite porte de la Cabane pour sçauoir ce qui estoit dedans, et trouuay vn homme seul estendu de son long aupres d’vn petit feu : ie m’informay de luy pourquoy il estoit ainsi sequestré du village, et de la cause qu’il se deüilloit ; il me respondît, moitié en Huron et moitié en Algoumequin, que c’estoit pour vn mal qu’il avoit aux parties naturelles, qui le tourmentoit fort, et duquel il n’esperoit que la mort, et que pour de semblables maladies ils auoient accoustumé entr’eux, de séparer et esloigner du commun ceux qui en estoient attaincts, de peur de gaster les autres par la frequentation, et neantmoins qu’on luy apportoit ses petites necessitez et partie de ce qui luy faisoit besoin, ses parens et amis ne pouuans pas d’auantage pour lors, à cause de leur pauureté. I’avois beaucoup de compassion pour luy ; mais cela ne luy seruoit que d’vn peu de diuertisse-