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mirable vertu ; ils pillent l’escorce et les feuilles de cet arbre, puis font bouillir le tout en eauë, et la boiuent de deus iours l’vn, et mettent le marc sur les jambes enflées et malades, et s’en trouuent bien tost gueris, comme de toutes autres sortes de maladies intérieures et extérieures.

Pour se rendre plus souples et dispos à la course, et pour purger les mauuaises humeurs des parties enflées, nos Hurons271||s’incisent et decouppent le gras des iambes, auec de petites pierres trenchantes, desquelles ils tirent encore du sang de leurs bras, pour reioindre et coler leurs pippes ou petunoirs de terre rompus, qui est vne très-bonne inuention, et vn secret d’autant plus admirable, que les pieces recolées de ce sang sont après plus fortes qu’elles n’estoient auparavant. I’admirois aussi de les voir eux-mesmes brusler par plaisir de la moëlle de sureau sur leurs bras nuds, et l’y laissoient consommer et esteindre : de sorte que les playes, marques et cicatrices y demeuroient imprimées pour tousiours.

Quand quelqu’vn veut faire suerie, qui est le remede le plus propre et le plus commun qu’ils ayent, pour se conseruer en santé, preuenir les maladies, et leur coupper chemin, il appelle plusieurs de ses amis pour suer avec luy : car luy seul ne le pourroit pas aysement faire. Il font donc rougir quantité de cailloux dans vn grand feu, puis les en retirent et mettent en vn monceau au milieu de la Cabane, ou la part qu’ils désirent dresser leur suerie, (car estans par les champs en voyage, ils en vsent quelques-fois) puis dressent tout à272||l’entour des bastons fichez en terre, à la hauteur de la ceinture, et plus, repliez, par des-