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rage, et fay que nous fassions bon voyage, auec quelqu’autre parole que ie n’entends point : et le Truchement, duquel nous auons parlé au chapitre precedent, nous a asseuré d’auoir fait vne fois vne pareille offrande auec eux (dequoy nous le tançasmes fort) et que son voyage luy fut plus profitable qu’aucun autre qu’il ait iamais faict en ces pays-là. C’est ainsi que le Diable les amuse, les maintient et conserue dans ses filets, et en des superstitions estranges, en leur prestans ayde et faueur, selon la croyance qu’ils luy ont en cecy, comme aux autres ceremonies et sorceleries que leur Oki obserue, et leur faict obseruer, pour la guerison de leurs maladies, et autres necessitez, n’offrans neantmoins aucune priere ny offrande à leur Yoscaha (au moins que nous ayons sceu), ains seulement à ces esprits particuliers, que ie viens de dire, selon les occasions.

Ils croyent les ames immortelles : et 233|| partans de ce corps, qu’elles s’en vont aussi-tost dancer et se resiouyr en la presence d’Yoscaha, et de sa Mere-grand’ Ataensiq, tenans la route et le chemin des Estoilles, qu’ils appellent Atiskein andahatey, le chemin des ames, que nous appelons la voye lactée, ou l’escharpe estoilée, et les simples gens le chemin de sainct Iacques. Ils disent que les ames des chiens y vont aussi, tenans la route de certaines estoilles, qui sont proches voysines du chemin des ames, qu’ils appellent Gagnenon andahatey, c’est à dire, le chemin des chiens, et nous disoient que ces ames, bien qu’immortelles, ont encore en l’autre vie les mesmes necessitez du boire et du manger, de se vestir et labourer les terres, qu’elles auoient lors qu’elles estoient encore reues-