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mens, aux vns plus, et aux autres moins, selon qu’il leur plaist : et tous ces genres de tourments et de morts sont si cruels, qu’il ne se trouue rien de plus inhumain : car premierement ils leur arrachent les ongles, et leur coupent les trois principaux doigts, qui servent à tirer de l’arc, et puis leur leuent toute la peau de la teste avec la cheuelure, et apres y mettent du feu et des cendres chaudes, ou y font degoutter d’une certaine gomme fondue, ou bien se contentent de les faire marcher tous nuds de corps et des pieds, au trauers d’vn grand nombre de feux faicts exprez, d’vn bout à l’autre d’vne grande Cabane, où tout le monde qui y est bordé des deux costez, tenans en main chacun vn tison allumé, luy en donnent dessus le corps en passant, 217|| puis apres auec des fers chauds luy donnent encore de jartieres à l’entour des jambes, et auec des haches rouges ils luy frottent les cuisses du haut-en-bas, et ainsi peu à peu bruslent ce pauure miserable : et pour luy augmenter ses tres-cuisantes douleurs, luy mettent par-fois de l’eau sur le dos, et luy mettent du feu sur les extremitez des doigts, et de sa partie naturelle, puis leur percent les bras prés des poignets, et auec des bastons en tirent les nerfs, et les arrachent à force, et ne les pouuans auoir les couppent, ce qu’ils endurent auec vne constance incroyable, chantans cependant auec vn chant neantmoins fort triste et lugubre, comme i’ay dict, mille menaces contre ces Bourreaux et contre toute cette Nation, et estant prest de rendre l’ame, ils le menent hors de la Cabane finir sa vie, sur un eschauffaut dressé exprez, là où on lui couppe la teste, puis on luy ouure le ventre, et là tous les enfans se trouuent pour