Page:Sagard - Le Grand voyage du pays des Hurons (Avec un dictionnaire de la langue huronne), Librairie Tross, 1865.djvu/156

Cette page a été validée par deux contributeurs.
— 118 —

peut-estre que parmy vn si grand nombre de noms qu’ils ont, il s’y en peut trouuer quelques-vns approchans des nostres.

Les anciennes femmes d’Allemaigne sont loüées par Tacite, d’autant que chacune nourrissoit ses enfans de ses propres mamelles, et n’eussent voulu qu’vne autre qu’elles les eust allaictez. Nos Sauuagesses, auec leurs propres mamelles, allaictent et nourrissent aussi les leurs, et n’ayant point l’vsage ny la commodité de la boüillie, elles leur baillent encore des mesmes viandes desquelles elles vsent, apres les auoir bien maschées, et ainsi peu à peu les esleuent. Que si la mere vient à mourir auant que l’enfant soit sevré, le pere prend de l’eau, dans laquelle aura tres-bien boüilly du bled d’Inde, et en emplit sa ||170 bouche, et ioignant celle de l’enfant contre la sienne, luy faict receuoir et aualer cette eauë, et c’est pour suppleer au deffaut de la mamelle et de la boüillie, ainsi que i’ay vue pratiquer au mary de nostre Sauuagesse baptizée. De la mesme inuention se seruent aussi les Sauuagesses, pour nourrir les petits chiens, que les chiennes leur donnent, ce que ie trouuois fort maussade et vilain, de ioindre ainsi à leur bouche le museau des petits chiens, qui ne sont pas souuent trop nets.

Durant le iour ils emmaillottent leurs enfans sur vne petite planchette de bois, où il y a à quelquesvnes vn arrest ou petit aiz plié en demy rond au dessous des pieds, et la dressent debout contre le plancher de la Cabane, s’ils ne les portent promener auec cette planchette derrière leur dos, attachée auec vn collier qui leur prend sur leur front, ou que hors du maillot