Page:Sagard - Le Grand voyage du pays des Hurons (Avec un dictionnaire de la langue huronne), Librairie Tross, 1865.djvu/144

Cette page a été validée par deux contributeurs.
— 106 —

et du corps et des pieds, leuans l’vn et puis l’autre, desquels ils frappent contre terre à la cadence des chansons, et s’esleuans comme en demy-sauts, et les filles branslans tous le corps, et les pieds de mesme se retournent au bout de quatre ou cinq petits pas, vers celuy ou celle qui les suit, ||153 pour lui faire la reverence d’vn hochement de teste. Et ceux ou celles qui se demeinent le mieux, et font plus à propos toutes les petites chimagrées, sont estimez entr’eux les meilleurs danceurs, c’est pourquoy ils ne s’y espargnent pas.

Ces dances durent ordinairement vne, deux et trois apres-disnées, et pour n’y receuoir d’empeschement à y bien faire leur deuoir, quoy que ce soit au plus fort de l’hyuer, ils n’y portent iamais autres vestemens ou couuertures que leurs brayers, pour couurir leur nudité, si ainsi il est permis, comme il l’est ordinairement, sinon que pour quelqu’autre suiet il soit ordonné de les mettre bas, n’oublians neantmoins iamais leurs colliers, oreillettes et brasselets, et de se peinturer par-fois ; comme au cas pareil les hommes se parent de colliers, plumes, peintures et autres fatras, dont i’en ai veu estre accommodez en Mascarades ou Caresme-prenans, ayans vne peau d’Ours qui leur couuroit tout le corps, les oreilles dressées au haut de la teste, et la face couuerte, excepté les yeux, et ceux-cy ne seruoient que de portiers ou bouffons, et ne se mesloient dans la dance que par interualle, à cause qu’ils ||154 estoient destinez à autre chose. Ie vis vn iour vn de ces bouffons entrer processionnellement dans la Cabane où se deuoit faire la dance, auec tous ceux qui estoient