destinée de la femme est d’être comme la
chienne, comme la louve ; elle doit appartenir
à tous ceux qui veulent d’elle ; c’est visiblement
outrager la destination que la nature
impose aux femmes, que de les enchaîner
par le lien absurde d’un hymen solitaire. Espérons
qu’on ouvrira les yeux, et qu’en assurant
la liberté de tous les individus, on
n’oubliera pas le sort des malheureuses filles ;
mais si elles sont assez à plaindre pour qu’on
les oublie, que, se plaçant d’elles-mêmes au-dessus
de l’usage et du préjugé, elles foulent
hardiment aux pieds les fers honteux dont
on prétend les asservir, elles triompheront
bientôt alors de la coutume et de l’opinion ;
l’homme devenu plus sage, parce qu’il sera
plus libre, sentira l’injustice qu’il y aurait à
mépriser celles qui agiront ainsi, et que l’action
de céder aux impulsions de la nature,
regardée comme un crime chez un peuple
captif, ne peut plus l’être chez un peuple
libre. Pars donc de la légitimité de ces principes,
Eugénie, et brise tes fers à quelque
prix que ce puisse être ; méprise les vaines
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