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pire ? La révolution préparée par la stupidité d’un peuple redevenu esclave, s’opéra sans le moindre obstacle ; comment pouvons-nous redouter que l’ouvrage de la philosophie soit plus pénible que celui du despotisme ? ce sont les prêtres seuls qui captivent encore aux pieds de leur dieu chimérique ce peuple que vous craignez tant d’éclairer, éloignez-les de lui, et le voile tombera naturellement ; croyez que ce peuple bien plus sage que vous ne l’imaginez, dégagé des fers de la tyrannie, le sera bientôt de ceux de la superstition ; vous le redoutez, s’il n’a pas ce frein, quelle extravagance ! ah, croyez-le, citoyens, Celui que le glaive matériel des loix n’arrête point, ne le sera pas davantage par la crainte morale des supplices de l’enfer dont il se moque depuis son enfance ; votre théïsme, en un mot, a fait commettre beaucoup de forfaits, mais il n’en arrêta jamais un seul ; s’il est vrai que les passions aveuglent, que leur effet soit d’élever un nuage sur nos yeux qui nous déguise les dangers dont elles sont environnées, comment pouvons-nous supposer que ceux qui, loin de nous, comme le sont les punitions annoncées par votre dieu, puissent parvenir à dissiper ce nuage que ne peut dissoudre le glaive même des

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