cer un aveugle à discerner les couleurs ? de ces premiers
principes, il découle, on le sent, la nécessité
de faire des loix douces, et sur-tout d’anéantir
pour jamais l’atrocité de la peine de mort, parce
que la loi qui attente à la vie d’un homme, est
impraticable, injuste, inadmissible ; ce n’est
pas, ainsi que je le dirai tout-à-l’heure, qu’il n’y
ait une infinité de cas où, sans outrager la nature
(et c’est ce que je démontrerai), les hommes
n’aient reçu de cette mère commune l’entière
liberté d’attenter à la vie les uns des autres, mais
c’est qu’il est impossible que la loi puisse obtenir
le même privilège, parce que la loi froide
par elle-même ne sauroit être accessible aux passions
qui peuvent légitimer dans l’homme la
cruelle action du meurtre ; l’homme reçoit de la
nature les impressions qui peuvent lui faire pardonner
cette action, et la loi au contraire toujours
en opposition à la nature, et ne recevant rien
d’elle, ne peut être autorisée à se permettre les
mêmes ècarts ; n’ayant pas les mêmes motifs, il est
impossible qu’elle ait les mêmes droits, voilà de
ces distinctions savantes et délicates qui échappent
à beaucoup de gens, parce que fort peu de
gens réfléchissent ; mais elles seront accueillies
des gens instruits à qui je les adresse, et elles
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