Page:Sade - Les crimes de l'amour, Nouvelles héroïques et tragiques, tome 4, 1799.djvu/91

Cette page a été validée par deux contributeurs.

quand je vous aurai su dans le sein du bonheur.

Amélie ne put entendre ces derniers mots sans se sentir émue… Des larmes involontaires la trahissent, et Monrevel la pressant alors dans ses bras, moment fortuné pour moi, s’écrie-t-il, j’ai pu lire un regret dans ce cœur que je crus à moi si long-temps ! Ô ma chère Amélie ! il n’est donc pas vrai que vous aimez Salins, puisque vous daignez pleurer Monrevel ? Dites un mot, Amélie, un seul mot ; et, quelle que soit la lâcheté du monstre qui vous enlève à moi, ou je le forcerai de se battre, ou je le punirai à-la-fois de son peu de courage et d’oser s’élever à vous.

Mais Amélie s’était remise : menacée de tout perdre, elle sentait trop l’importance de soutenir le rôle qui lui était enjoint pour oser faiblir un instant. Je ne déguiserai point les larmes que vous avez surprises, chevalier, dit-elle avec fermeté ; mais vous en interprétez mal la cause : un mouvement de pitié pour vous peut les avoir fait couler sans