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qu’elle en dit un mot ; elle congédia Lucenai, et recommanda plus que jamais à sa fille de déguiser ses sentimens, de les étouffer même, puisqu’aucunes circonstances ne contraignaient plus un hymen… qui ne se ferait à présent jamais.

Ces dispositions remplies, la jalouse comtesse se voyant délivrée des entraves qui s’opposaient à ses sentimens effrénés pour l’amant de sa fille, ne s’occupa plus que des moyens de réfroidir le jeune châtelain pour Amélie, et de l’enflammer pour elle.

Ses premières démarches furent de s’emparer de toutes les lettres que Monrevel pouvait écrire à l’armée de Charles, et de le retenir chez elle, en irritant son amour, en lui laissant une sorte d’espoir éloigné, qui traversé sans cesse, le captiva, tout en le désolant ; de profiter ensuite de l’état où elle allait mettre son âme, pour le disposer peu-à-peu en sa faveur, imaginant en femme habile, que le dépit lui rapporterait ce qu’elle ne pourrait obtenir de l’amour.