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Cécile, dans les commencemens de son ivresse, fut avertie des suites plus d’une fois par nous ; nous lui prédîmes tout ce qui lui est arrivé, rien ne l’arrêta, elle a méprisé nos conseils, elle a méconnu nos ordres, en un mot, elle s’est jeté volontairement dans le précipice, quoique nous le lui montrassions sans cesse entr’ouvert sous ses pas. Une fille qui aime ses parens, ne se conduit point ainsi ; tant qu’étayée par le suborneur à qui elle doit sa chûte, elle a cru pouvoir nous braver, elle l’a fait insolemment ; il est bon qu’elle sente à présent ses torts, il est juste que nous lui refusions nos secours, quand elle les a méprisés, lorsqu’elle en avait un besoin si réel ; Cécile a fait une sottise, monsieur, elle en ferait bientôt une seconde ; l’éclat a eu lieu ; nos amis, nos parens savent qu’elle a fui la maison paternelle, honteuse de l’état où l’avaient réduit ses travers ; restons-en là, et ne nous obligez point à r’ouvrir notre sein à une créature sans âme et sans conduite, qui n’y rentrerait que pour nous préparer de nouvelles douleurs ».