Page:Sade - Les crimes de l'amour, Nouvelles héroïques et tragiques, tome 4, 1799.djvu/231

Cette page a été validée par deux contributeurs.

pour lui inspirer, partageant toujours l’injustice de Franval, qui en nourrissait les semences par des lettres réglées, Eugénie n’imaginait pas qu’elle pût avoir au monde une plus grande ennemie que sa mère. Il n’y avait pourtant rien que ne fît celle-ci pour détruire dans sa fille l’éloignement invincible que cette ingrate conservait au fond de son cœur ; elle l’accablait de caresses et d’amitié, elle se félicitait tendrement avec elle de l’heureux retour de son mari, portait la douceur et l’aménité au point de remercier quelquefois Eugénie, et de lui laisser tout le mérite de cette heureuse conversion ; ensuite, elle se désolait d’être devenue l’innocente cause des nouveaux malheurs qui menaçaient Franval ; loin d’en accuser Eugénie, elle ne s’en prenait qu’à elle-même, et la pressant sur son sein, elle lui demandait avec des larmes, si elle pourrait jamais lui pardonner… L’âme atroce d’Eugénie résistait à ces procédés angéliques. Cette âme perverse n’entendait plus la voix de la nature, le vice avait fermé tous les