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adorait toujours ; peut-on haïr ce qu’on a bien aimé ? Avec l’âme délicate et sensible de cette intéressante femme, voit-on de sang-froid, à ses pieds, noyé des larmes du remords, l’objet qui fut si précieux. Des sanglots s’échappèrent… Moi, dit-elle, en pressant sur son cœur les mains de son époux… moi qui n’ai jamais cessé de t’idolâtrer, cruel ! c’est moi que tu désespères à plaisir !… ah ! le ciel m’est témoin que de tous les fléaux dont tu pouvais me frapper, la crainte d’avoir perdu ton cœur, ou d’être soupçonné par toi, devenait le plus sanglant de tous… Et quel objet encore tu prends pour m’outrager ?… ma fille !… c’est de ses mains dont tu perces mon cœur… tu veux me forcer de haïr celle que la nature m’a rendue si chère ? Ah ! dit Franval, toujours plus enflammé, je veux la ramener à tes genoux, je veux qu’elle y abjure, comme moi, et son impudence et ses torts… qu’elle obtienne, comme moi, son pardon. Ne nous occupons plus tous trois que de notre mutuel bonheur. Je vais te rendre ta fille…