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brave Raunai, offrit sa tête pour sauver celle du père de sa maîtresse, pendant qu’un duc de Guise, un étranger qui gouvernait l’état, croyait le servir alors par une foule de crimes et d’assassinats journaliers ». Le duc se taisait, mais il était facile de démêler dans ses yeux une sorte de contrainte et d’embarras qui peignait l’agitation de son âme ; ébranlé par des reproches aussi vifs, et qui lui arrivaient de toutes parts, ne pouvant vaincre sa passion, ne se dissimulant pas quel tort elle lui ferait dans l’esprit de la cour, si jamais elle se découvrait, il demandait des conseils au comte ; il rejetait ceux qui ne favorisaient pas ses desirs ; quelquefois il se décidait à des sacrifices, l’instant d’après on n’entendait plus de lui que des menaces ; il s’étonnait qu’on lui résistât ; il voulait en faire repentir ceux qui l’osaient, et ces oscillations perpétuelles, ce flux et ce reflux orageux d’une âme tour-à-tour emportée par l’amour et par le devoir, le rendait le plus infortuné des hommes.