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votre parti, car je n’en démordrai pas. Et si vous résistez en la moindre chose aux propositions et aux actions auxquelles nous allons vous soumettre, vous, madame, et vous, mademoiselle, je vous mène dès demain dans le fond d’une terre, toutes les deux, dont vous ne reviendrez de vos jours.” Alors l’épouse jeta quelques larmes, et comme l’homme auquel je la destinais attendait, je la priai de passer dans l’appartement qui lui était destiné, pendant que sa fille resterait très en sûreté dans une autre chambre avec mes filles, jusqu’à ce que son tour vînt. À ce moment cruel, il y eut encore quelques pleurs, et je vis bien que c’était la première fois que ce mari brutal exigeait pareille chose de sa femme ; et malheureusement le début était dur, car, indépendamment du goût baroque du personnage à qui je la livrais, c’était un vieux libertin fort impérieux et fort brusque, et qui ne la traiterait pas très honnêtement. “Allons, point de pleurs, lui dit le mari en entrant. Songez que je vous observe, et que si vous ne satisfaites pas amplement l’honnête homme auquel on vous livre, j’entrerai moi-même pour vous y contraindre.” Elle entre, et nous passons, le mari et moi, dans la chambre d’où l’on pouvait tout voir. On n’imagine pas à quel point ce vieux scélérat s’échauffa l’imagination en contemplant sa malheureuse épouse victime de la brutalité d’un inconnu. Il se délectait à chaque chose qu’on exigeait d’elle ; la modestie, la candeur de cette pauvre femme, humiliée sous les atroces procédés du libertin qui s’en amusait, lui composait un spectacle délicieux. Mais quand il la vit brutalement posée à terre, et le vieux magot à qui je l’avais livrée lui chier sur la gorge, et quand il vit les pleurs, les dégoûts de sa femme, aux propositions et à l’exécution de cette infamie, il n’y tint pas, et la main dont je le branlais fut à l’instant couverte de foutre. Enfin, cette première scène cessa, et si elle lui avait donné du plaisir, ce fut autre chose quand il put jouir de la seconde. Ce n’était pas sans de grandes difficultés et surtout sans de grandes menaces, que nous étions parvenus à faire passer la jeune fille, témoin des larmes de sa mère et ignorant ce qu’on lui avait fait. La pauvre petite faisait toutes sortes de difficultés ; enfin nous la décidâmes. L’homme à qui je la livrais était parfaitement instruit de tout ce qu’il y avait à faire ; c’était une de mes pratiques ordinaires que je gratifiais de cette bonne fortune, et qui, par reconnaissance, consentait à tout ce que j’en exigeais. “Oh ! le beau cul ! s’écria le père libertin, dès que le miché de sa fille nous l’exposa entièrement à nu. Oh ! sacredieu, les belles fesses ! — Eh ! quoi, lui dis-je, est-ce donc la première fois que vous les voyez — Oui, vraiment, me dit-il, il m’a fallu cet expédient pour jouir de ce spectacle ; mais si c’est la première fois que je vois ce beau fessier, je proteste bien que ce ne sera pas la dernière.” Je le branlais vivement, il s’extasiait ; mais quand il vit l’indignité qu’on exigeait de cette jeune vierge, quand il vit les mains d’un libertin consommé se promener sur ce beau corps qui n’avait jamais souffert pareil attouchement, quand il vit qu’on la faisait mettre à genoux, qu’on la forçait d’ouvrir la bouche, qu’on introduisait un gros vit dedans et qu’on y déchargeait, il se rejeta en arrière, en jurant comme un possédé, en protestant