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de le juger. L’examen fut très long et très sévère ; on combattit ses opinions, on en changea, on visita quinze fois de suite, et la pomme fut généralement accordée à Zéphire : on convint unanimement qu’il était physiquement impossible de rien trouver de plus parfait et de mieux coupé. On passa aux filles ; elles prirent les mêmes postures ; la décision fut d’abord très longue : il était presque impossible de décider entre Augustine, Zelmire et Sophie. Augustine, plus grande, mieux faite que les deux autres, l’eût incontestablement emporté peut-être chez les peintres ; mais les libertins veulent plus de grâce que d’exactitude, plus d’embonpoint que de régularité. Elle eut contre elle un peu trop de maigreur et de délicatesse ; les deux autres offraient une carnation si fraîche, si potelée, des fesses si blanches et si rondes, une chute de reins si voluptueusement coupée qu’elles l’emportèrent sur Augustine. Mais comment décider entre les deux qui restaient ? Dix fois les opinions se trouvèrent égales. Enfin Zelmire l’emporta ; on assembla ces deux charmants enfants, on les baisa, mania, branla toute la soirée, on ordonna à Zelmire de branler Zéphire, qui, déchargeant à merveille, donna le plus grand plaisir à observer dans le plaisir ; à son tour il branla la jeune fille, qui se pâma dans ses bras ; et toutes ces scènes d’une lubricité indicible firent perdre du foutre au duc et à son frère, mais n’émurent que faiblement Curval et Durcet, qui convinrent qu’il leur fallait des scènes moins couleur de rose pour émouvoir leur vieille âme usée, et que toutes ces drôleries-là n’étaient bonnes que pour des jeunes gens. Enfin on fut se coucher, et Curval, au sein de quelques nouvelles infamies, fut se dédommager des tendres pastourelles dont on venait de le rendre témoin.