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« Il n’était pas tout à fait si pénible pour moi, dit Duclos : il ne s’agissait que de se cuirasser la main d’un bon gant, puis de prendre avec cette main du gravier brûlant dans une poêle, sur un réchaud, et, la main ainsi remplie, il fallait frotter mon homme avec ce gravier presque en feu, depuis la nuque du col jusqu’aux talons. Son corps était si singulièrement endurci à cet exercice qu’il semblait que ce fût du cuir. Quand on en était au vit, il fallait le prendre et le branler au milieu d’une poignée de ce sable brûlant ; il bandait fort vite ; alors, de l’autre main, je plaçais sous ses couilles la pelle toute rouge et préparée à dessein. Ce frottement d’une part, cette chaleur dévorante dont ses testicules étaient dévorés, peut-être un peu d’attouchements sur mes deux fesses, que je devais toujours tenir très présentées pendant l’opération, tout cela le faisait partir, et il déchargeait, ayant bien soin de faire couler son sperme sur la pelle rouge et de le considérer brûler avec délices. »

« Curval, dit le duc, ceci est un homme qui ne me paraît pas aimer la population plus que toi. — Cela m’en a l’air, dit Curval ; je ne te cache pas que j’aime l’idée de vouloir brûler son foutre. Oh ! je vois bien toutes celles qu’elle te donne, dit le duc ; et fût-il même éclos tu le brûlerais avec le même plaisir, n’est-ce-pas ? — Ma foi, je le crains fort, dit Curval, en faisant je ne sais quoi à Adélaïde qui lui fit jeter un grand cri. — Et à qui en as-tu, putain, dit Curval à sa fille, à piailler de la sorte ?… Ne vois-tu pas que le duc me parle de brûler, de vexer, de morigéner du foutre éclos ; et qu’es-tu, je t’en prie, sinon un peu de foutre éclos au sortir de mes couilles ? Allons, poursuivez, Duclos, ajouta Curval, car je sens que les pleurs de cette garce-là me feraient décharger, et je ne veux pas. »

« Nous voici, dit cette héroïne, à des détails qui, portant avec eux des caractères de singularité plus piquants, vous plairont peut-être davantage. Vous savez que l’usage, à Paris, est d’exposer les morts aux portes des maisons. Il y avait un homme dans le monde qui me payait douze francs par chacun de ces appareils lugubres où je pouvais le conduire dans ma soirée. Toute sa volupté consistait à s’en approcher avec moi le plus près possible, au bord même du cercueil, si nous pouvions, et là, je devais le branler en sorte que son foutre éjaculât sur le cercueil. Nous en allions courir comme cela trois ou quatre dans la soirée, suivant le nombre que j’en avais découvert, et nous faisions la même opération à tous, sans qu’il me touchât autre chose que le derrière pendant que je le branlais. C’était un homme d’environ trente ans, et j’ai eu sa pratique plus de dix ans, pendant lesquels je suis sûre de l’avoir fait décharger sur plus de deux mille cercueils. »

« Mais disait-il quelque chose pendant son opération ? dit le duc. Adressait-il quelque parole à vous ou au mort ? — Il invectivait le mort, dit Duclos ; il lui disait : “Tiens, coquin ! tiens, bougre ! tiens, scélérat ! emporte