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voulu ainsi, et j’ai son ordre dans ma poche. La personne qui vous a envoyé chez moi vous a tendu un piège, car elle savait bien de quoi il était question, et certainement elle aurait pu vous éviter cette scène. Au reste, vous savez votre affaire ; on ne se livre pas impunément aux crimes noirs et affreux que vous avez commis, et je vous trouve fort heureux d’en être quitte à si bon marché.” Notre homme avait écouté ma harangue avec la plus grande attention, et, dès qu’elle fut finie, il se jeta en pleurant à mes genoux, en me suppliant de le ménager. “Je sais bien, dit-il, que je me suis grandement oublié. J’ai puissamment offensé Dieu et la Justice ; mais puisque c’est vous, ma bonne dame, qui êtes chargée de ma correction, je vous demande avec instance de me ménager. — Monsieur, lui dis-je, je ferai mon devoir. Que savez-vous si je ne suis pas moi-même examinée, et si je suis maîtresse de me livrer à la compassion que vous m’inspirez ? Déshabillez-vous et soyez docile, c’est tout ce que je puis vous dire.” Grancourt obéit, et, dans une minute, il fut nu comme la main. Mais, grand Dieu ! quel corps offrait-il à ma vue ! Je ne puis vous le comparer qu’à un taffetas chiné. Il n’y avait pas une place de ce corps tout marqué qui ne portât l’épreuve d’une déchirure. Cependant j’avais mis au feu une discipline de fer, armée de pointes aiguës, qui m’avait été envoyée le matin avec l’instruction. Cette arme meurtrière se trouva rouge à peu près au même instant où Grancourt se trouva nu. Je m’en empare, et commençant à le flageller avec, doucement d’abord, puis un peu plus fort, et puis à tour de bras, et cela indistinctement depuis la nuque du col jusqu’au talon, en un instant je mets mon homme en sang. “Vous êtes un scélérat, lui disais-je en frappant, un gueux qui avez commis toutes sortes de crimes. Rien n’est sacré pour vous, et dernièrement encore, on dit que vous avez empoisonné votre mère. — Cela est vrai, madame, cela est vrai, disait-il en se branlant, je suis un monstre, je suis un criminel ; il n’y a pas d’infamie et que je n’aie faite et que je ne sois prêt à faire encore. Allez, vos coups sont inutiles ; je ne me corrigerai jamais, j’ai trop de volupté dans le crime ; vous me tueriez que je le commettrais encore. Le crime est mon élément, il est ma vie, j’y ai vécu et j’y veux mourir.” Et vous sentez combien, m’animant lui-même par ces propos, je redoublais et mes invectives et mes coups. Un “foutre !” lui échappe pourtant : c’était le signal ; à ce mot, je redouble de vigueur et tâche de le frapper sur les endroits les plus sensibles. Il cabriole, il saute, il m’échappe, et va se jeter, en déchargeant, dans une cuve d’eau tiède préparée tout exprès pour le purifier de cette sanglante cérémonie. Oh ! pour le coup, je cédai à ma compagne l’honneur d’en avoir vu plus que moi sur cet article, et je crois que nous pouvions bien nous dire, alors, les deux seules de Paris qui en eussions vu autant, car notre Grancourt ne variait jamais, et il y avait plus de vingt ans qu’il allait tous les trois jours chez cette femme pour pareille expédition.

« Peu après, cette même amie m’adressa chez un autre libertin dont la fantaisie, je le crois, vous paraîtra pour le moins aussi singulière. La scène se passait à sa petite maison, au Roule. On m’introduit dans une chambre