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écrivant sèchement que celle qui avait trouvé l’argent avait aussi trouvé autre chose, et que, s’il se décidait à continuer ses poursuites, j’y consentais, mais que, chez le même juge où je déposerais ce qu’il y avait dans les petits tiroirs, je le citerais pour déposer ce qui était dans les grands. Notre homme se tut, et comme, six mois après, leur débauche à tous trois vint à éclater et qu’ils passèrent eux-mêmes en pays étranger, n’ayant plus rien à redouter, je revins à Paris, et, faut-il vous avouer mon inconduite, Messieurs ? j’y revins aussi pauvre que j’en étais partie, et si tellement que je fus obligée de me remettre chez la Fournier. Comme je n’avais que vingt-trois ans, les aventures ne me manquèrent pas. Je vais laisser celles qui ne sont pas de notre ressort et reprendre, sous votre bon plaisir, messieurs, les seules auxquelles je sais que vous prenez maintenant quelque intérêt.

« Huit jours après mon retour, on plaça dans l’appartement destiné aux plaisirs un tonneau entier de merde. Mon adonis arrive ; c’est un saint ecclésiastique, mais si tellement blasé sur ces plaisirs-là qu’il n’était plus susceptible de s’émouvoir que par l’excès que je vais peindre. Il entre ; j’étais nue. Il regarde un moment mes fesses, puis, après les avoir touchées assez brutalement, il me dit de le déshabiller et aider à entrer dans le tonneau. Je le mets nu, je le soutiens, le vieux pourceau se place dans son élément, par un trou préparé il en fait au bout d’un instant sortir son vit presque bandant et m’ordonne de le branler malgré les saletés et les horreurs dont il est couvert. J’exécute, il plonge la tête dans le tonneau, il barbote, il avale, il hurle, il décharge, et va se jeter de là dans une baignoire où je le laisse entre les mains de deux servantes de la maison qui le nettoyèrent un quart d’heure.

« Un autre parut peu après. Il y avait huit jours que j’avais chié et pissé dans un vase soigneusement conservé ; ce terme était nécessaire pour que l’étron fût au point où le désirait notre libertin. C’était un homme d’environ trente-cinq ans et que je soupçonnai dans la finance. Il me demande en entrant où est le pot ; je le lui présente, il le respire : “Est-il bien certain, me dit-il, qu’il y a huit jours que c’est fait ? — Je puis vous en répondre, lui dis-je, monsieur, et vous voyez comme il est déjà presque moisi. — Oh ! c’est ce qu’il me faut, me dit-il ; il ne peut jamais l’être trop pour moi. Faites-moi voir, je vous en prie, continua-t-il, le beau cul qui a chié cela.” Je le lui présente. “Allons, dit-il, placez-le bien en face, et de manière à ce que je puisse l’avoir pour perspective en dévorant son ouvrage.” Nous nous arrangeons, il goûte, il s’extasie, il se renfonce dans son opération et dévore en une minute ce mets délicieux en ne s’interrompant que pour observer mes fesses, mais sans aucune autre espèce d’épisode, car il ne sortit pas même son vit de sa culotte.

« Un mois après, le libertin qui se présenta ne voulut avoir affaire qu’à la Fournier elle-même. Et quel objet choisissait-il, grand Dieu ! Elle avait alors soixante-huit ans faits ; un érésipèle lui mangeait toute la peau, et huit dents pourries dont sa bouche était décorée lui communiquaient une odeur si fétide qu’il devenait comme impossible de lui parler de près. Mais