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un vase entre nous deux, nous nous postâmes dos à dos, nous chiâmes à la fois, il s’empare du vase, de ses doigts mêle les deux étrons, et les avale tous deux, pendant que je le fais décharger dans ma bouche. À peine regarda-t-il mon derrière. Il ne le baisa point, mais son extase n’en fut pas moins très vive ; il trépigna, jura tout en gobant et en déchargeant, et se retira en me donnant quatre louis pour cette bizarre cérémonie.

« Cependant mon financier prenait chaque jour en moi plus de confiance et plus d’amitié, et cette confiance, dont je ne tardai pas d’abuser, devint bientôt la cause de notre éternelle séparation. Un jour qu’il m’avait laissée seule dans son cabinet, je remarquai qu’il remplissait sa bourse, pour sortir, dans un tiroir fort large et entièrement rempli d’or. Oh ! quelle capture, me dis-je en moi-même. Et ayant dès cet instant conçu l’idée de m’emparer de cette somme, j’observai avec le plus grand soin tout ce qui pouvait me l’approprier. D’Aucourt ne fermait point ce tiroir, mais il emportait la clef du cabinet, et ayant vu que cette porte et cette serrure étaient très légères, j’imaginai qu’il me faudrait bien peu d’efforts pour faire sauter l’une et l’autre avec facilité. Ce projet adopté, je ne m’occupai plus que de saisir avec empressement le premier jour où d’Aucourt s’absenterait pour tout le jour, comme cela lui arrivait deux fois de la semaine, jour de bacchanale particulière, où il se rendait avec Desprès et l’abbé pour des choses que Mme Desgranges vous dira peut-être, mais qui ne sont pas de mon ministère. Ce favorable instant se présenta bientôt. Les valets, aussi libertins que leur maître, ne manquaient jamais d’aller à leurs parties ce jour-là, de façon que je me trouvai presque seule à la maison. Pleine d’impatience d’exécuter mon projet, je me rends tout de suite à la porte du cabinet, d’un coup de poing je la jette en dedans, je vole au tiroir, j’y trouve la clé : je le savais. J’en tire tout ce que j’y trouve ; il n’y avait pas moins de trois mille louis. Je remplis mes poches, je fouille les autres tiroirs ; un écrin fort riche s’offre à moi, je m’en empare ; mais que trouvai-je dans les autres tiroirs de ce fameux secrétaire !… Heureux d’Aucourt ! Quel bonheur pour toi que ton imprudence ne fût découverte que par moi ! Il y avait de quoi le faire rouer, messieurs, c’est tout ce que je peux vous dire. Indépendamment des billets clairs et expressifs que Desprès et l’abbé lui adressaient sur leurs bacchanales secrètes, il y avait tous les meubles qui pouvaient servir à ces infamies… Mais je m’arrête ; les bornes que vous m’avez prescrites m’empêchent de vous en dire davantage, et la Desgranges vous expliquera tout cela. Pour moi, mon vol fait, je décampai en frémissant intérieurement de tous les dangers que j’avais peut-être courus à fréquenter de tels scélérats. Je passai à Londres, et comme mon séjour en cette ville où je vécus six mois sur le plus grand ton ne vous offrirait, messieurs, aucun des détails qui vous intéressent seuls, vous permettrez que je coule légèrement sur cette partie des événements de ma vie. Je n’avais conservé de commerce à Paris qu’avec la Fournier, et comme elle m’instruisit de tout le tapage que faisait le financier pour ce malheureux vol, je résolus à la fin de le faire taire, en lui