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rougit. “Approchez, approchez, lui dit le libertin, et faites-moi voir vos fesses. — Monsieur…, dit l’enfant interdit. — Allons donc, allons donc, dit le vieux libertin ; il n’y a rien de pis que toutes ces petites novices-là ; ça ne conçoit pas qu’on veuille voir un cul. Allons, troussez donc, troussez donc !” Et la petite s’avançant à la fin, de peur de déplaire à la Fournier à laquelle elle a promis d’être bien complaisante, se trousse à moitié par-derrière. “Plus haut donc, plus haut, dit le vieux paillard. Croyez-vous que je vais prendre cette peine-là moi-même ?” Et, à la fin, le beau cul paraît tout à fait. L’abbé le lorgne, la fait tenir droite, la fait courber, lui fait resserrer les jambes, les lui fait écarter, et l’appuyant contre le lit, il frotte un moment avec grossièreté toutes ses parties de devant, qu’il a mises à l’air, contre le joli cul d’Eugénie, comme pour s’électriser, comme pour attirer à lui un peu de la chaleur de ce bel enfant. De là, il passe aux baisers, il s’agenouille pour y procéder plus à l’aise et, tenant de ses deux mains ces belles fesses dans le plus grand écartement possible, et sa langue et sa bouche en vont farfouiller les trésors. “On ne m’a point trompé, dit-il, vous avez un assez beau cul. Y a-t-il longtemps que vous n’avez chié ? — Tout à l’heure, monsieur, dit la petite. Madame avant de monter m’a fait prendre cette précaution-là. — Ah ! ah !… de façon qu’il n’y a plus rien dans les entrailles, dit le paillard. Eh bien, nous allons voir.” Et s’emparant alors de la seringue, il la remplit de lait, revient près de son objet, braque la canule et darde le clystère. Eugénie, prévenue, se prête à tout, mais à peine le remède est-il dans le ventre, que, se couchant à plat sur un canapé, il ordonne à Eugénie de venir se mettre à califourchon sur lui et de lui rendre toute sa petite affaire dans la bouche. La timide créature se place comme on lui a dit, elle pousse, le libertin se branle, sa bouche, hermétiquement collée sur le trou, ne lui laisse pas perdre une goutte de la liqueur précieuse qui en découle. Il avale tout avec le soin le plus exact, et à peine est-il à la dernière gorgée que son foutre s’échappe et vient le plonger dans le délire. Mais quelle est donc cette humeur, ce dégoût qui, chez presque tous les véritables libertins, suit la chute de leurs illusions ? L’abbé rejetant la petite fille loin de lui brutalement, dès qu’il a fini, se rajuste, dit qu’on l’a trompé en disant qu’on ferait chier cette enfant, qu’elle n’avait sûrement point chié et qu’il a avalé la moitié de son étron. Il y a à remarquer que M. l’abbé ne voulait que du lait. Il grogne, il jure, il peste, dit qu’il ne paiera point, qu’il ne viendra plus ; que c’est bien la peine qu’il se déplace pour des petites morveuses comme cela, et part en ajoutant à cela mille autres invectives que je trouverai l’occasion de vous raconter dans une autre passion dont elles sont le principal, au lieu qu’elles ne seraient ici qu’un très mince accessoire. »

« Parbleu, dit Curval, voilà un homme bien délicat : se fâcher parce qu’il a reçu un peu de merde ? Et ceux qui en mangent ! — Patience, patience, monseigneur, dit Duclos, permettez que mon récit aille dans l’ordre que vous