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sur ses conduites, et je ne veux pas qu’il se pervertisse.“ — „Ah, il n’est plus temps,“ dit Curval, „il n’est plus temps, je décharge, ah double Dieu ! la belle morte,“ — et le scélérat en enconnant Adélaïde se figurait comme le duc, qu’il foutait sa fille assassinée, incroyable égarement de l’esprit du libertin, qui ne peut rien entendre, rien voir, qu’il ne veuille à l’instant l’imiter.203) „Duclos, continue,“ dit l’évêque, „car l’exemple de ce coquin-là me séduirait, et dans l’état où je suis, je ferais peut-être pis qu’eux.“ — „Quelque temps après cette avanture, je fus seule chez [143]un autre libertin,“ dit Duclos, „dont la manière peut-être plus humiliante n’était pourtant pas aussi sombre, il me reçoit dans un salon, dont le parquet était orné d’un très beau tapis, me fait mettre nue, puis me faisant placer à quatre pattes : „Voyons,“ dit-il en parlant de deux grands danois, qu’il avait à ses côtés, „qui de mes chiens ou toi sera le plus leste, va chercher !“ — Et en même temps il jette un gros maron rôti à terre, et me parlant, comme à une bête, „apporte, apporte“ me dit-il ; je cours à quatre pattes après le maron dans le dessein d’entrer dans l’esprit de sa fantaisie, et de le lui rapporter, mais les deux chiens ; s’élançant après moi, m’ont bientôt devancée, ils saisissent le maron, et le rapportent au maître : „Vous êtes une franche maladroite,“ me dit alors le patron, „avez-vous peur que mes chiens ne vous mangent ? n’en craignez rien, ils ne vous feront aucun mal, mais intérieurement ils se moqueront de vous, s’il vous voient moins habiles qu’eux, allons, votre revanche — apporte !“ nouveau maron lancé, et nouvelle victoire remportée par les chiens sur moi, enfin le jeu dure