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la dévote Adélaïde, et sa jeune élève Sophie eurent de la peine à prononcer de telles infamies, et c’est ce qui divertissait infiniment. Tout cela réglé, on admit la délation ; ce moyen barbare de multiplier les vexations admis chez tous les tyrans, fut embrassé avec chaleur, il fut décidé que tout sujet qui porterait une plainte contre un autre gagnerait la suppression de la moitié de sa punition à la première faute, qu’il commettrait, ce qui n’engageait à rien du tout, parce que les sujets qui venaient d’accuser un autre, ignoraient toujours, où devait aller la punition, dont on lui promettait de gagner la moitié, moyennant quoi il était très aisé de lui donner tout ce qu’on voulait donner et de lui persuader encore qu’il avait gagné, on décida et l’on publia que la délation serait crue sans preuve, ensuite qu’il suffirait d’être accusé n’importe par qui, pour être à l’instant inscrit, on augmenta de plus l’autorité des vieilles et sur leur moindre plainte vraie ou non, le sujet était condamné sur-le-champ. On établit en un mot sur ce petit peuple toute la vexation, toute l’injustice qu’on put imaginer, sûr de retirer des sommes d’autant plus fortes de plaisirs que la tyrannie aurait été le mieux exercée, cela fait on visita les garderobes, Colombe se trouva coupable : elle s’excusa sur ce qu’on lui avait fait manger la veille entre ses repas, et qu’elle n’avait pu y résister, qu’elle était bien malheureuse que c’était la quatrième semaine de suite, qu’elle était punie, le fait était vrai, et il ne fallait en accuser que son cul qui était le plus frais, le mieux tourné et le plus mignon, qu’on pût voir ; elle objecta qu’elle ne s’était pas torchée et que ça devait au moins lui valoir quelque chose. — Durcet examina et lui ayant effectivement