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secrète, ensuite non loin jour jusque là nous fûmes trouver la mère de Lucile, tel pour préparer la reconnaissance avec sa fille que pour aviser aux moyens d’enlever sa sœur. Lucile, bien instruite, ne reconnut sa mère que pour l’insulter, lui dire qu’elle était cause de ce qu’elle s’était jetée dans le libertinage, et mille autre propos semblables qui déchiraient le cœur de cette pauvre femme, et troublaient tout le plaisir qu’elle avait à retrouver sa fille. Je crus dans ce début trouver nos textes, et je présentai à la mère qu’ayant retiré sa fille aînée du libertinage, je m’offrais d’en retirer la seconde, mais [le] moyen ne réussit pas, la malheureuse pleura et dit que pour rien au monde on ne lui arracherait le seul secours, qui lui restait dans sa seconde fille, qu’elle était vieille, infirme, qu’elle recevait des soins de cet enfant, et que l’en priver, serait lui arracher la vie, ici, je l’avoue à ma honte, messieurs, mais je sentis un petit mouvement au fond de mon cœur, qui me fit connaître que ma volupté allait croître du raffinement d’horreur que j’allais dans ce cas mettre à mon crime, et ayant prévenu la vieille que dans peu de jours, sa fille viendrait lui rendre une seconde visite avec un homme en crédit, qui pourrait lui rendre de grands services, nous nous retirâmes, et je ne m’occupai que d’employer mes cordes ordinaires, pour me rendre maîtresse de cette jeune fille. Je l’avais bien examinée, elle en valait la peine, 15 ans, une jolie taille, une très belle peau, et de très jolis traits ; trois jours après, elle arriva, et après l’avoir examinée sur toutes les parties de son corps, et n’y avoir rien trouvé que de charmant, que de très potelé et de très frais, malgré la mauvaise nourriture, où elle était condamnée depuis