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mait à avoir cette vieille Fanchon près de lui alors, parce qu’elle avait au mieux trouvé l’art de le calmer, soit en s’offrant elle-même, soit en lui présentant tout de suite quelqu’un des objets qui couchaient dans sa chambre. Cette nuit, le président qui se rappelle tout de suite quelques infamies faites à sa fille en s’endormant, la redemande tout de suite pour les recommencer, mais elle n’y était pas, qu’on juge du trouble et de la rumeur qui excite aussitôt un tel avènement, Curval se lève en fureur, demande sa fille, on allume des bougies, on cherche, on fouille, rien ne paraît, le premier mouvement fut de passer dans l’appartement des filles, on visite tous les lits et l’intéressante Adélaïde se trouve enfin assise à déshabille auprès de celui de Sophie, les deux charmantes filles qui unissaient au caractère de tendresse égal[ement] une piété, des sentiments de vertu, de candeur et d’aménité absolument les mêmes, s’étaient prises de la plus belle tendresse l’une pour l’autre et elles se consolaient mutuellement du sort affreux qui les accablait, on ne s’en était pas douté jusque lors, mais les suites firent découvrir que ce n’était pas la première fois que cela arrivait, et l’on sut que la plus âgée entretenait l’autre de ces meilleurs sentiments et l’engageait surtout à ne pas s’éloigner de la religion et de ses devoirs envers un Dieu, qui les consolerait un jour de tous leurs maux. Je laisse au lecteur de juger de la fureur et des emportements de Curval lorsqu’il découvrit là la belle missionaire, il la saisit par les cheveux et l’accabla d’injures, il la traîna dans sa chambre, où il l’attacha à la colonne du lit et la laissa là jusqu’au, lendemain matin réfléchir à son incartade. Chacun