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depuis qu’il éclairait le monde. Il est donc faux que le ciel condamne les égaremens des hommes ! il est donc absurde d’imaginer qu’il s’en offense ! Accorderait-il ses faveurs aux scélérats comme aux honnêtes gens, s’il était irrité par le crime ?… Eh ! non, non, dis-je à mes amis qui le lendemain, de sang-froid, écoutaient mes réflexions ; non, non, nous n’offensons rien en nous livrant au crime. Un dieu ? Comment s’en offenserait-il, puisqu’il n’existe pas ?… La nature ?… Encore moins, poursuivis-je, en me rappelant l’excellente morale dont j’avais été nourrie : l’homme ne dépend point de la nature ; il n’en est pas même l’enfant ; il est son écume, son résultat ; il n’a point d’autres loix que celles imprimées aux minéraux, aux plantes, aux bêtes, et quand il se perpétue, il accomplit des loix personnelles à lui, mais nullement nécessaires à la nature… nullement desirées par elle : la destruction satisfait bien plus cette mère universelle, puisqu’elle vise à lui rendre une puissance qu’elle perd par notre propagation. Ainsi, nos crimes lui plaisent, mes amis, et nos vertus l’offensent ; ainsi, l’atrocité dans le crime est ce qu’elle desire le plus ardemment ; car celui qui la servirait