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d’un nombreux domestique et d’un magnifique mobilier, j’y donnai des fêtes somptueuses, où vous croyez bien que Philogone et Calni n’étaient point oubliés. Tergowitz passait pour mon frère, je favorisais ses démarches, et les appuyais par des projets d’alliance que je laissais légèrement entrevoir ; on commençait à m’écouter sans peine ; une seule chose contrariait mes desirs. Cette malheureuse fille, contre laquelle je machinais intérieurement les plus grandes horreurs, ne s’avisait-elle pas de m’aimer. Dès que je lui eus parlé de mon frère ; un tel projet me flatte assurément, monsieur, me dit-elle, mais mon protecteur laissant mon choix libre, j’ose vous assurer avec franchise, que j’eusse mieux aimé que vos propositions ne regardassent que vous. Belle Philogone, répondis-je, cet aveu flatte infiniment mon amour-propre ; mais je dois vous répondre avec la même candeur. De malheureux penchans dont je ne suis pas maître, m’éloignent absolument des femmes, et l’obligation où vous seriez en devenant la mienne, de singer le sexe que je préfère, ne vous rendrait pas aussi heureuse que vous méritez de l’être. Comme je vis