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jamais que le phantôme créé par leurs intérêts ou par leurs passions[1].

Cependant l’époque approchait, le desir d’un changement était tel qu’il ne s’agissait plus que de cela dans toutes les conversations. Plus adroit politique que mes associés, je vis le monument de leur fortune à bas, au même instant où ils l’édifiaient ; plus calme qu’eux, je sondai les esprits, et l’immense quantité de gens que je reconnus fermement attachés au parti du roi, me convainquit que la révolution sénatoriale était avortée. Ce fut alors, où fidèle aux principes d’égoïsme et de scélératesse auxquels je voulais sacrifier toute ma vie, je résolus de changer à l’instant de parti, et de trahir inhumainement celui qui m’avait reçu ; il était le plus faible, je le voyais ; ce n’était ni la bonté de l’un, ni le vice de l’autre, qui me décidait, je ne l’étais que par la force, et ce n’était uniquement que vers la force que je voulais me diriger. Je serais infailliblement resté du parti séna-

  1. Voyez dans Lafontaine, la fable ingénieuse des grenouilles qui demandent un roi. Malheureux habitans de ce globe, voilà votre histoire à tous !