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nonchalance à cette pollution légère par laquelle personne ne sait s’irriter ou irriter les autres comme vous. Donnez ensuite à votre imagination la liberté de vous présenter par gradation, différentes sortes d’égaremens ; parcourez-les tous en détail ; passez les successivement en revue ; persuadez-vous bien que toute la terre est à vous… que vous avez le droit de changer, mutiler, détruire, bouleverser tous les êtres que bon vous semblera ; vous n’avez rien à craindre là ; choisissez ce qui vous fait plaisir, mais plus d’exception, ne supprimez rien ; nul égard pour qui que ce soit ; qu’aucun lien ne vous captive ; qu’aucun frein ne vous retienne ; laissez à votre imagination tous les frais de l’épreuve, et sur-tout ne précipitez pas vos mouvemens ; que votre main soit aux ordres de votre tête et non de votre tempérament. Sans vous en appercevoir, des tableaux variés que vous aurez fait passer devant vous, un viendra vous fixer plus énergiquement que les autres, et avec une telle force que vous ne pourrez plus l’écarter ni le remplacer ; l’idée acquise par le moyen que je vous indique, vous dominera, vous captivera, le délire s’emparera de vos sens ; et vous