Page:Sade - La nouvelle Justine, ou les malheurs de la vertu, suivie de L'histoire de Juliette, sa soeur, tome 8, 1797.djvu/347

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

actions, dans tous ses propos, dans toutes ses démarches ; l’éducation le déguise quelquefois, mais il ne tarde pas à reparaître ; il s’annonce alors sous toutes sortes de formes : le chatouillement excessif qu’il fait éprouver, soit à l’idée, soit à l’exécution du crime qu’il conseille, nous prouve d’une manière invincible, que nous sommes nés pour servir d’instrument aveugle aux loix des règnes, ainsi qu’à celles de la nature, et qu’aussitôt que nous nous y prêtons, la volupté nous y caresse à l’instant.

Eh ! recompensez-le ce meurtrier, employez-le au lieu de le punir ; songez qu’il n’est point de crime d’aussi peu d’importance par lui-même, et qui demande néanmoins autant de vigueur et de force, autant de courage et de philosophie. Dans mille cas, un gouvernement éclairé ne devrait se servir que d’assassins. Juliette, celui, qui sait étouffer les cris de sa conscience, au point de se faire un jeu de la vie des autres, est de ce moment seul capable des plus grandes choses. Il y a tout plein de gens dans le monde qui deviennent criminels pour leur compte, parce que le gouvernement ne sent pas ce qu’ils valent,