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tôt mis hors d’état de parler. Le Vasari avait raison, il vivait dans un siècle et dans une ville où le machiavélisme faisait des progrès ; il était sage à lui de ne pas s’exposer aux cruels effets de cette doctrine.

On me fit observer peu loin de là un autel d’or massif, orné de belles pierres précieuses, que je ne vis pas sans les convoiter. Cette immensité de richesses était, m’expliqua-t-on, un ex voto que le grand Duc Ferdinand second, qui mourut en 1630, offrit à Saint-Charles-Borromée, pour le rétablissement de sa santé ; le present était en route lorsque le prince mourut, les héritiers décidèrent assez philosophiquement que, puisque le saint n’avait pas exaucé le vœu, ils étaient exempts de le récompenser, et ils firent revenir le tresor. Que d’extravagances deviennent les fruits de la superstition, et comme on peut assurer avec vérité que de toutes les folies humaines, celle-là, sans doute est celle qui dégrade le plus l’esprit et la raison !

Je passai de-là à la fameuse Vénus du Titien, et j’avoue que mes sens se trouvèrent plus émus à la contemplation de ce tableau sublime, qu’ils ne l’avoient été des ex voto