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vées l’une et l’autre ; nous nous affublâmes de nos godmichés, et devenant tour-à-tour amantes et maîtresses, devenant épouses, maris, tribades et bardaches, il n’y eut sorte de plaisirs que nous n’essayâmes ; mais Honorine toujours novice, n’inventant rien, ne faisait que se prêter… que mettre la pudeur et la timidité à la place de la débauche et de la luxure ; elle ne me donnait pas le quart des plaisirs que j’éprouvais avec la Borghèse. Si elle eût été tout-à-fait neuve, l’idée de la corrompre eut remplacé sur mon imagination tous les plaisirs piquans que je recevais du libertinage ; mais Honorine, quoique prude, et presque novice encore, avait pourtant eu des aventures, et ce fat dans un de ces momens d’ivresse mutuelle où les confiances qu’on se fait, ajoutent si bien aux plaisirs qu’on se donne, que la charmante duchesse me raconta l’anecdote suivante.

La première année de mon mariage, me dit-elle (j’avais alors seize ans) j’étais extrêmement liée avec la marquise Salviati, ayant le double de mon âge, et qui avait eu toute sa vie l’art de déguiser les désordres les plus affreux sous les apparences de la plus pro-