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ris ceux-là plus que tout. Tu as raison, répondis-je, les crimes les plus délicieux à commettre, sont ceux qui n’ont aucuns motifs ; il faut que la victime soit parfaitement innocente ; ses fautes, en légitimant ce que nous lui faisons, ne laissent plus à notre iniquité le délicieux plaisir de les exercer gratuitement. Il faut absolument faire mal, il faut avoir des torts : cela se peut-il, lorsque la victime s’en trouve elle-même couverte ? J’aime l’ingratitude, dans ce cas, poursuivis-je, elle éveille dans l’ame de celui qu’on outrage, de petits remords que j’aime à produire ; nous le forçons à se désoler de nous avoir fait plaisir, et rien n’est délicieux comme cela. Je le conçois, répondit Olimpe, et dans ce cas, j’aurais quelque chose de bien bon à exécuter. Mon père vit, il m’accable de biens et de carresses, il m’adore ; j’ai déchargé vingt fois à la seule idée de rompre de tels nœuds ; je n’aime point la reconnaissance, son poids pèse trop fortement sur mon cœur, je ne respire que pour m’en dégager. On assure d’ailleurs que le parricide est un bien grand crime, je brûle de m’en souiller… Mais écoute, Juliette, vois jusqu’où va ma perfide imagina-