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faisait éprouver ; j’y fus cette troisième fois bien déterminée à lui déclarer ma passion, et bien résolue à la satisfaire, quelques fussent les obstacles que sa vertu pût m’opposer : c’était au sortir d’une de ces toilettes lubriques si propres à séduire et à enchaîner tous les cœurs, que je me présentai chez elle. Le hasard favorisant mes projets, je la trouvai seule ; les premiers complimens faits, je laissai parler mes yeux ; par pudeur, on les évita : je mis aussitôt les louanges et la séduction à la place de l’amour, et saisissant une des mains de la duchesse : femme délicieuse, lui dis-je, s’il existe un Dieu dans le ciel, et qu’il soit juste, vous devez être la femme la plus heureuse de la terre, comme vous en êtes la plus belle. — Votre indulgence vous fait parler ainsi, mais je me rends justice. — Ah ! si vous vous la rendiez, madame, ce serait sur l’autel des Dieux qu’il faudrait vous placer : celle qui mérite aussi bien les hommages de l’univers entier, ne devrait habiter qu’un temple… Et je lui serrais les mains, je les lui baisais en disant cela… Pourquoi me flattez-vous, me dit Honorine, en rougissant ? — Ah ! c’est que je vous adore. — Est-ce que des