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Et en effet, qui ne voit pas qu’un Dieu, rempli de contradictions, de bisarreries, de qualités incompatibles, en échauffant l’imagination, ne rapporte néanmoins à l’esprit qu’une ; chimère. On croit fermer la bouche à ceux qui nient l’existence de ce Dieu, en leur disant, que les hommes, dans tous les siècles, dans tous les pays, ont reconnu l’empire d’une divinité quelconque, qu’il n’est pas de peuple sur la terre, qui n’ait eu la croyance d’un être invisible et puissant, dont il a fait l’objet de son culte et de sa vénération : enfin, qu’il n’est pas de nation si sauvage qu’on puisse la supposer, qui ne soit persuadée de l’existence de quelqu’être supérieur à la nature humaine. Premièrement je nie ce fait ; mais cela fût-il même, la croyance de tous les hommes peut-elle changer une erreur en vérité. Il fut un temps, où tous les hommes ont cru que le soleil tournait autour de la terre, tandis que celle-ci demeurait immobile. Cette unanimité de foi changea-t-elle cette erreur en réalité ? Il fut un temps où personne ne voulait croire l’existence des antipodes ; on persécutait ceux qui avaient la témérité de la soutenir. Que de peuples cru-