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voudrais pour modèle, une femme plus rapprochée de moi, je desirerais qu’elle fût plus âgée, qu’elle m’aimât, qu’elle eût mes goûts, mes passions, et que, quoique nous nous branlassions ensemble, elle me permit tous mes autres écarts, sans la moindre jalousie ; je voudrais néanmoins qu’elle eût une sorte d’empire, sans pourtant chercher à me dominer ; que ses conseils fussent bons, qu’elle eût infiniment de condescendance pour mes caprices, et d’expérience du libertinage ; sans religion comme sans principes ; sans mœurs comme sans vertu, infiniment de chaleur dans l’esprit, et le cœur à la glace.

J’ai ton affaire, me répondit, Noirceuil ; c’est une veuve âgée de trente ans, d’une beauté rare, scélérate au dernier degré, possédant toutes les qualités que tu exiges, et qui te sera d’un grand secours dans la carrière où tu viens d’entrer, elle me remplacera pour ton éducation ; car tu vois que séparés, comme nous le sommes, je ne pourrai plus te suivre avec la même chaleur ; Madame de Clairwil, en un mot, riche à million, connaît tout ce qu’on peut connaître, sait tout ce qu’on peut savoir,