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Êtes-vous donc des amis de cet homme, dis-je à St.-Fond ? Je ne suis l’ami de personne, me répondit le ministre ; je ménage cet original par politique, il ne laisse pas que de contribuer à ma fortune, il est fort bien avec le roi ; mais qu’il soit disgracié demain, je deviendrai le plus ardent de ceux qui l’écraseront ; il a deviné mes goûts, je ne sais comment ; il a voulu les partager, j’y ai consenti, voilà tous nos liens. Est-ce que vous ne l’aimez pas, Juliette ? — Je ne puis le souffrir. — Ma foi, sans les raisons de politique dont je viens de vous faire part, je vous le livrerais… mais je le perdrai si vous voulez, vous me plaisez au point, madame, qu’il n’est rien que je ne fasse pour vous. — Ne dites-vous pas que vous lui avez des obligations ? — Quelques-unes. — Eh bien, comment d’après vos principes, pouvez-vous l’envisager un instant ? — Laissez-moi faire, Juliette, j’arrangerai tout cela, et en même tems St.-Fond me renouvela tous ses éloges sur la manière dont j’avais conduit cette fête ; tu es, me dit-il, remplie de goût et d’esprit, et plus je te connais, plus je sens la nécessité de t’attacher à moi : c’était la première fois qu’il me tutoyais ; il me fit