Page:Sade - La nouvelle Justine, ou les malheurs de la vertu, suivie de L'histoire de Juliette, sa soeur, tome 6, 1797.djvu/329

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

force sur l’esprit des hommes, et influeraient bien davantage sur leur conduite, que les châtimens éloignés de l’avenir, que l’on perd de vue dès que les passions parlent ?

L’expérience journalière ne nous fournit-elle pas des preuves convaincantes du peu d’effet que la crainte des châtimens de l’autre vie, produit sur beaucoup de ceux qui en sont le plus persuadés ; il n’est point de peuples plus convaincus du dogme de l’éternité des peines que les espagnols, les portugais et les italiens ; en est-il de plus dissolus ? Se commet-il enfin plus de crimes secrets que parmi les prêtres et parmi les moines, c’est-à-dire parmi ceux qui paraissent le plus convaincus des vérités religieuses ; et cela ne prouve-t-il pas évidemment que les bons effets produits par le dogme des châtimens éternels, sont très-rares et très-incertains. Nous allons voir que ses mauvais effets sont innombrables et sûrs : en effet, une pareille doctrine en remplissant l’ame d’amertume, y jette de la divinité, les notions les plus révoltantes : elle endurcit le cœur, et le plonge dans un désespoir désavantageux à cette divinité, dont vous prétendez par ce dogme étayer le sys-