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Est-il rien de plus décisif contre l’existence d’une autre vie que ce passage ! Est-il rien de plus propre à soutenir l’opinion contraire à celle de l’immortalité de l’ame et du dogme ridicule de l’enfer.

Quelles réflexions viennent donc à l’homme sensé, en examinant cette fable absurde de l’éternelle condamnation de l’homme dans le paradis terrestre, pour avoir mangé d’un fruit défendu ? Quelque minutieuse que soit cette fable, quelque dégoûtante que l’on la trouve, qu’on me permette de m’arrêter un moment sur elle, puisque c’est d’elle que l’on part pour l’admission des peines éternelles de l’enfer. Faut-il autre chose que l’examen impartial de cette absurdité, pour en reconnaître le néant ? O mes amis ! je vous le demande, un homme rempli de bonté planterait-il dans son jardin un arbre qui produirait des fruits délicieux, mais empoisonnés ; ou se contenterait-il de défendre à ses enfans d’en manger, en leur disant qu’ils mourront s’ils osent y toucher ? S’il savait qu’il y eut un tel arbre dans son jardin, cet homme prudent et sage, n’aurait-il pas bien plutôt l’attention de le faire abbatre, sur-tout sachant très-bien que sans cette précaution