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nullement sûr qu’il y ait du bien à tirer de l’infortune le malheureux que la nature y place, il est bien plus simple d’étouffer le sentiment qui nous rend sensible à ses malheurs que de le laisser germer, dans l’appréhension, peut-être, d’outrager la nature, en dérangeant ses vues si nous y compâtissons ; le mieux, alors, est de nous mettre en un tel état, que nous ne voyons plus ces maux qu’avec indifférence. Ah ! chère amie, si, comme moi, tu avais la force de faire un pas de plus, si tu avais le courage de trouver du plaisir à la contemplation des maux d’autrui, rien que par cette idée satisfaisante de ne les pas éprouver soi-même, idée qui, nécessairement, produit une volupté sure ; si tu pouvais aller jusques-là ; tu aurais beaucoup gagné pour ton bonheur, sans doute, puisque tu serais parvenue à changer en roses une partie des épines de la vie ; ne doute pas un instant, ma bonne, que les Denis, les Nérons, les Louis XI, les Tibères, les Venceslas, les Hérodes, les Andronics, les Héliogabales, les Retz ect.[1], n’ayent été heureux par

  1. C’est du Maréchal dont on parle ici.